L’article 2244 du Code civil prévoit qu’une citation en justice interrompt la prescription tandis que l’article 2262bis du même Code précise que « toute action en réparation d’un dommage fondée sur une responsabilité extracontractuelle se prescrit par 5 ans (…) ».
En 2006, la Cour de cassation a jugé que la requête en annulation d’un acte administratif devant le Conseil d’Etat n’interrompt ni ne suspend la prescription du droit de réclamer, devant le tribunal civil, une réparation pour acte public illicite (Cass., 16 février 2006, C.05.0022.N et C.05.0050.N).
Vu l’arriéré au Conseil d’Etat, le délai pour obtenir un arrêt devant la haute juridiction administrative constatant l’illégalité d’un acte administratif dépassait souvent le délai de prescription de 5 ans.
Cela a eu pour conséquence que le justiciable qui choisissait d’attaquer un acte administratif devant le Conseil d’Etat devait, à titre conservatoire, introduire également une action en réparation du dommage causé par cet acte administratif devant le juge civil afin d’éviter la prescription de son action.
Afin de corriger cela, une loi du 25 juillet 2008 a complété l’article 2244, §1er, du Code civil de la manière suivante :
« Pour l'application de la présente section, un recours en annulation d'un acte administratif devant le Conseil d'Etat a, à l'égard de l'action en réparation du dommage causé par l'acte administratif annulé, les mêmes effets qu'une citation en justice. »
Le recours au Conseil d’Etat n’était donc pas interruptif de la prescription si la procédure n’aboutissait pas à un arrêt d’annulation.
Dans un arrêt n°148/2018 du 8 novembre 2018, la Cour constitutionnelle déclare que la nouvelle disposition n’est pas pertinente par rapport aux objectifs du législateur (à savoir, d’une part, ne pas faire peser sur le justiciable les conséquences liées à l’arriéré du Conseil d’Etat et, d’autre part, mettre un terme à une pratique qui encombre les rôles des tribunaux civils d’affaires qui ne sont pas en état d’être jugées).
Elle déclare que la nouvelle disposition viole les articles 10 et 11 de la Constitution en ce qu’elle ne confère pas un effet interruptif de la prescription aux recours introduits devant le Conseil d’Etat qui n’aboutissent pas à un arrêt d’annulation.
Dans un arrêt n°40/2019 du 28 février 2019, la Cour constitutionnelle annule le mot « annulé » contenu dans l’article 2244, §1er, alinéa 3 du Code civil.
Il en ressort que, désormais, toute requête en annulation au Conseil d’Etat possède un effet interruptif de la prescription de l’article 2262bis du Code civil, même si la procédure n’aboutit pas à un arrêt d’annulation.
Il est à noter que depuis la réforme du Conseil d’Etat de 2014, le Conseil d’Etat peut accorder directement des dommages et intérêts sous la forme d’une indemnité réparatrice. Il n’est donc plus obligatoire d’introduire une telle action devant le tribunal civil.