Dans un arrêt du 13 décembre 2021, la Cour de cassation a tranché la question de l’octroi d’un sursalaire pour travail de nuit effectué avant 2010 dans le secteur des soins de santé.
En l’espèce, la problématique soumise à la Cour de cassation concerne le paiement d’un supplément de salaire pour les heures prestées entre 20 et 21 heures par une garde-malade occupée au sein d’une maison de repos.
Durant la période litigieuse de 2007 à 2010, l’horaire habituel de travail se situait entre 15 heures et 21 heures.
La Cour de cassation s’est penchée sur les notions de "prestations irrégulières" et de "prestations de nuit" pouvant donnant lieu à l’octroi d’un sursalaire dans le secteur des services de santé.
Elle relève qu’une convention collective de travail relative aux suppléments pour des prestations irrégulières a été conclue le 7 décembre 2000 au sein de la Commission paritaire des services de santé et a été modifiée par une convention collective du travail du 30 juin 2006.
Elle constate que la C.C.T. du 7 décembre 2000 prévoit l’octroi d’un supplément au salaire barémique en faveur du "personnel travaillant la nuit" et qu’après sa modification par la CCT du 30 juin 2006, il est question de supplément sur la rémunération barémique octroyé au "personnel effectuant des prestations de nuit".
Toujours selon les dispositions de ces C.C.T., le sursalaire n’est dû que si cette intervention financière est effectivement prise en charge par le gouvernement.
La Cour de cassation considère que, pour la période litigieuse, l’indemnité financière spécifique n’est due qu’aux travailleurs occupés dans des régimes de travail comportant des prestations de nuit et uniquement pour ces prestations, au sens de l’article 38 de la loi du 16 mars 1971 sur le travail, et non pour toutes les heures de travail de nuit au sens de l’article 35 de cette même loi c’est-à-dire toute heure de travail exécutée entre 20 heures et 6 heures.
Selon l’enseignement de la Cour de cassation, pour la période antérieure à 2010, le personnel travaillant dans le secteur des soins de santé, ne peut prétendre à un sursalaire s’il n’est pas occupé principalement entre 20 heures et 6 heures.
Le Ministère public fait observer que l’évolution législative postérieure à la période litigieuse confirme cette analyse.
L’arrêté royal du 28 décembre 2011 qui retire celui du 22 juin 2010 relatif au financement du sursalaire dispose en effet que "toutes les heures entre 20 heures et 6 heures sont considérées comme des heures de nuit et qu’un sursalaire pour les prestations de nuit est octroyé pour la tranche horaire de 20 heures à 6 heures, en vertu des règles en vigueur au 31 décembre 2009, aux infirmiers et aux aide soignants travaillant dans les maisons de repos pour personnes âgées et les maisons de soins, au prorata de la prestation effectivement prestée dans cette tranche horaire."
L’expression "toutes les heures prestées" reprise dans les deux arrêtés royaux relatifs au financement du sursalaire confirment l’analyse selon laquelle, avant 2010, toutes les heures prestées (comme en l’espèce de 20 à 21 heures) ne donnaient pas droit à un sursalaire.
Le droit au sursalaire pour des travailleurs de la commission paritaire 330 qui, comme dans le cas soumis à la sagesse de la Cour de cassation, effectuent des prestations entre 20 heures et 6 heures et dont les prestations, soit se situent exclusivement entre 6 heures et 24 heures, soit débutent habituellement à partir de 5 heures, n’a finalement été financé (prise en charge par l’assurance soins de santé et indemnité) que par application des arrêtés royaux des 22 juin 2010 et 28 décembre 2011, c’est-à-dire pour la période postérieure à la période litigieuse.