La loi sur le financement des PME : Une relation mieux équilibrée?

La loi du 21 décembre 2013 relative à diverses dispositions concernant le financement des petites et moyennes entreprises devrait entrer entièrement en vigueur le 1er mars 2014 suite à la signature du Code de conduite le 16 janvier 2014 par UNIZO, UCM et FEBELFIN.

Cette nouvelle législation a pour but de faciliter l’accès aux crédits pour les PME et de renforcer les devoirs de rigueur et d’information du prêteur professionnel lors de l’octroi du crédit et en cas de refus d’octroi d’un crédit.

Elle comporte une disposition réglant les clauses de « funding loss » ou de remploi qui ont provoqué de nombreux litiges.

La loi donne au juge une sanction civile particulière : « la conversion sans frais du crédit en une forme de crédit mieux adaptée » et frappe de nullité un certain nombre de clauses réputées abusives.

En quelques mots :

  1. Quels sont les entreprises protégées par la nouvelle législation ?

    La loi protège les entreprises et les personnes exerçant une profession libérale pour autant qu’elles répondent à la définition de PME figurant à l’article 15 §1er du Code des sociétés (soit les entreprises qui emploient moins de 50 personnes, sur base de la moyenne annuelle et dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 7,3 millions d’euros HTVA ou le total du bilan annuel ne dépasse pas 3,65 millions d’euros à moins qu’elles emploient annuellement en moyenne plus de 100 personnes. L’évaluation du critère PME se fait au moment de la demande de crédit)

  2. Devoir d’information renforcé du banquier – obligation de « suitability »

    Le prêteur doit rechercher le type de crédit le mieux adapté compte tenu de la situation financière de l’entreprise au moment de la conclusion du contrat de crédit et du but du crédit.

    Dans la pratique, le prêteur proposera souvent différentes variantes : un taux d’intérêts fixe ou variable, un crédit avec des mensualités fixes ou un crédit dégressif avec remboursement du capital fixe, une ou plusieurs échéances adaptées à la situation financière de l’entreprise,…

    Si le prêteur n’a pas fourni une forme de crédit appropriée, le juge, outre les conséquences civiles existantes (nullité, résolution), peut ordonner la conversion sans frais du crédit en une forme de crédit dont le type et le montant sont mieux adaptés compte tenu de la situation financière de l’entreprise au moment de la conclusion du contrat et du but du crédit.


  3. Devoir d’information en cas de refus d’octroi du crédit

    En cas de refus d’octroi d’un crédit, le prêteur informe l’entreprise des éléments essentiels sur lesquels ce refus est basé et qui ont influencé l’évaluation des risques.

    Cette information peut être donnée soit par écrit soit oralement. L’entreprise peut obtenir que la notification verbale soit clarifiée par écrit.

    Cette obligation de transparence au niveau des refus de crédit devrait permettre à l’entrepreneur demandeur d’un crédit de réintroduire son dossier en répondant aux objections du prêteur ou de soumettre son dossier à un autre prêteur après l’avoir corrigé.


  4. Nouvelles règles relatives aux « funding loss » et indemnités de remploi

    La loi distingue différentes hypothèses :

    • Lorsque le crédit peut être qualifié de prêt à intérêts conformément à l’article 1907bis du Code civil, l’indemnité de remploi ne peut excéder 6 mois d’intérêts ;
    • Lorsqu’il s’agit d’une ouverture de crédit qui ne peut être considérée comme un prêt à intérêt, l’indemnité de remploi, si elle a été stipulée, ne peut excéder 6 mois d’intérêts calculés sur la somme remboursée et au taux fixé dans le contrat pour les crédits aux entreprises dont le montant initial ne dépasse pas 1 million d’euros ;
    • Si le crédit dépasse 1 million d’euros, sans préjudice de l’application de l’article 1907bis du Code civil, la pratique dite des « funding loss » est maintenue mais son montant doit être fixé en conformité avec les modalités de calcul énoncées dans le Code de conduite adopté en vertu de l’article 10 de la loi.

      Cette disposition règle la problématique des clauses de « funding loss » qui ont donné lieu à de nombreuses plaintes et litiges, le montant de ces indemnités pouvant provoquer de très désagréables surprises pour l’emprunteur et s’avérer très nettement supérieur à l’équivalent de 6 mois d’intérêts.
  5. Entrée en vigueur de la loi

    La loi dans l’ensemble de ses dispositions devrait entrer en vigueur le 1er mars 2014 suite à la signature du Code de conduite intervenue le 16 janvier 2014 et dont la date d’entrée en vigueur devrait être fixée par un arrêté royal lui conférant force obligatoire.

    La nouvelle législation ne sera cependant applicable qu’aux contrats de crédits conclus à dater de l’entrée en vigueur de la loi.

Avocat(s)