"Le bonheur, c’est de continuer à désirer ce que l’on possède" et à le protéger?

Le bonheur, c’est de continuer à désirer ce que l’on possède

Rarement utilisée, souvent mésusée, l’action possessoire présente pourtant un intérêt indéniable. En effet, moyennant certaines conditions, elle permet au possesseur d’être réintégré dans sa possession en cas de violences ou de voies de fait de manière rapide, sans verser dans un long débat judiciaire au fond, afin d’éviter de subir une justice privée. 
L’invocation avec succès de l’action doit cependant remplir les conditions évoquées à l’article 3.25 du Code civil. Celui-ci dispose que : "Le possesseur d'un droit réel immobilier, dont la possession est paisible et publique, peut se faire réintégrer dans sa possession, sans préjudice des règles de la responsabilité extracontractuelle, en intentant une action possessoire, dans l'année du trouble ou de la dépossession commis avec voie de fait ou violence.
Le possessoire et le pétitoire ne peuvent être cumulés.
"
Dès lors, les cinq conditions ci-dessous doivent être réunies. 

  1. Droit réel immobilier
    Premièrement, la loi exclut les droits de créance et les meubles du champ d’application de cette protection. Par conséquent, seuls les titulaires d’un droit de propriété, de copropriété, de servitude, d’usufruit, d’emphytéose ou de superficie portant sur un immeuble pourront se prévaloir de cette action.

  2. Possession paisible et publique
    Ensuite, la possession de ce droit doit être paisible et publique.
    L’absence de violence signifie non seulement que le possesseur ne doit pas être entré en possession de manière violente, mais aussi qu’il ne soit pas victime de violence émanant de tiers durant la possession.
    La publicité, quant à elle, signifie que la possession doit être exercée "au grand jour", sans se cacher ; en matière immobilière, la possession est rarement clandestine.

  3. Délai d’un an
    Troisièmement, l’action doit être intentée dans un délai d’un an après la survenance du trouble ou de la dépossession. La question du point de départ du délai en cas de troubles successifs est controversée en doctrine ; toutefois, dans l’hypothèse d’un trouble unique et continu, le point de départ du délai sera celui du début du trouble.

  4. Trouble ou dépossession commis avec voie de fait ou violence
    Par ailleurs, l’action possessoire suppose un trouble ou une dépossession commis avec voie de fait ou violence ayant pour effet de priver le possesseur de sa jouissance.
    La notion de voie de fait inclut tout acte d’autorité arbitraire et illégitime au moyen duquel quelqu’un prétend se faire justice à lui-même tandis que la violence recouvre les seules hypothèses d’agression sur la personne du demandeur. La voie de fait ou la violence peut émaner d’une autorité publique.
    Les troubles et les dépossessions les plus récurrents peuvent être exemplifiés par les cas de figure suivants : la plantation d’arbres, l’arrachage d’une haie, la suppression de clôtures, le percement d’un mur séparatif, l’obstacle à l’exercice d’une servitude, …

  5. Absence de cumul entre possessoire et pétitoire
    Cinquièmement, l’article 1371, alinéa 1er, du Code judiciaire et l’article 3.25, in fine, du Code civil disposent que le possessoire (instance portant sur la possession du droit réel) et le pétitoire (instance portant sur le fond du droit réel) ne peuvent être cumulés. Cette règle s’applique non seulement au juge, mais aussi aux parties.
    Cela signifie que les deux instances ne peuvent être portées ensemble devant le même juge, ni jugées simultanément devant deux juridictions différentes. En outre, le défendeur au possessoire ne peut intenter une action pétitoire avant que la décision sur la demande au possessoire ne soit coulée en force de chose jugée, c’est-à-dire qu’elle ne soit définitive.
    Enfin, le juge ne pourra se prononcer sur le droit réel invoqué. Aussi, l’invocation d’arguments relevant du fonds du droit réel sera superfétatoire au cours de cette procédure.

Ces nombreuses conditions, une fois remplies, permettent d’obtenir la remise en pristin état du fonds et ainsi condamner l’auteur du trouble ou de la voie de fait à, par exemple, replanter un arbre ou une haie, à replacer une clôture, à reconstruire un mur ou encore à faire cesser l’entrave à l’exercice d’une servitude.

 

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