L’indemnisation de l’aggravation du dommage dans le cadre de réserves

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Le Tribunal de 1ère instance de Liège -  division Verviers, ainsi que le Tribunal de première instance de Luxembourg -  division Neufchâteau ont été appelés récemment à envisager l’indemnisation de l’aggravation d’un dommage, rentrant dans le cadre de réserves. Les deux juridictions ont toutes deux considéré par des jugements prononcés dans le courant du mois de décembre 2019, que l’indemnisation devait se faire, sous déduction de l’incapacité permanente, reconnue préalablement dans le cadre de l’indemnisation du dommage initial. 

Si ce principe semble difficilement contestable pour ce qui concerne l’incapacité permanente telle qu’elle résulte de l’aggravation, elle était par contre contestée pour l’indemnisation de l’incapacité temporaire, s’agissant dans les deux cas de la pose ou du renouvellement d’une prothèse, les parties préjudiciées considérant que, même sans l’indemnisation de l’incapacité permanente précédente, le bilan séquellaire temporaire devait aboutir à des pourcentages de 100 %. Cela aurait cependant entrainé l’indemnisation d’un préjudice temporaire de 100% majoré de l’incapacité permanente initiale, soit une indemnisation supérieure à 100%... ! Les deux juridictions n’ont ainsi pas suivi cette position.

Le Tribunal de 1ère instance de Luxembourg- division Neufchâteau précise à cet égard que « la nature permanente ou temporaire d’une incapacité dépend uniquement de la circonstance que les lésions sont consolidées ou non, c’est-à-dire stabilisées. Le caractère permanent ou temporaire d’une incapacité ne change rien au fait que dans tous les cas, il est question d’une réduction de la capacité personnelle, ménagère ou professionnelle de la victime. Ainsi, les incapacités temporaires résultant de l’aggravation du dommage ne peuvent pas être cumulées avec celles dont souffrait Monsieur X de manière permanente, après la première consolidation, sous peine de compter deux fois la même chose, à savoir une réduction de capacité .
A suivre Monsieur X, il conviendrait de lui reconnaitre des périodes d’incapacité temporaire de 100% pendant l’aggravation + 18% pour le préjudice permanent et initial, ce qui reviendrait à dire que sa capacité aurait été réduite de 118%...
».

Le Tribunal de première instance de Verviers a en outre considéré - spécifiquement pour l’incapacité ménagère qui n’avait pas fait l’objet d’une indemnisation séparée dans le cadre du premier jugement - que cette incapacité ne pouvait être indemnisée qu’à concurrence de l’aggravation du dommage et non pas à concurrence du  dommage initial, même s’il n’avait pas été indemnisé précédemment.

 Le tribunal considère à cet égard que l’indemnisation de l’incapacité ménagère initiale est prescrite dans cette hypothèse. Il nous semble pour le surplus que, indemniser un préjudice couvert par la première procédure, et donc ne résultant pas de l’aggravation, reviendrait à violer l’autorité de chose jugée portant sur l’indemnisation du préjudice initial, qui n’avait pas visé ce type de préjudice précis.

Le Tribunal de 1ère instance de Verviers précise à cet égard que « la réclamation formulée par la partie civile, (…) relativement à son préjudice ménager, concerne un dommage pour lequel il n’a pas été admis de réserve, son dommage n’ayant pas été examiné dans le cadre du jugement rendu le 5 avril 2000. C’est donc au regard des prescriptions reprises à l’alinéa 3 de l’article 2262bis du Code civil que l’action de la partie civile visant à voir indemnisé son préjudice ménager doit être appréciée. En l’espèce, il s’est écoulé plus de 20 ans entre le fait générateur du dommage ménager et la première réclamation formulée à ce sujet par la partie civile ». 
 

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