Dans un arrêt n° 213.949, du 17 juin 2011, le Conseil d’Etat a résumé sa position actuelle concernant les critères à employer pour décider de la qualification d’un organisme comme autorité administrative au sens de l’article 14 des LCCE.
On rappellera que la question n’est pas dénuée d’importance, notamment en matière de marchés publics, puisqu’elle permet de déterminer la juridiction compétente – Conseil d’Etat ou cours et tribunaux de l’ordre judiciaire – pour statuer sur un recours en suspension et/ou annulation de décisions relatives à l’attribution d’un marché public.
Résumé :
Le Conseil d’Etat décide que pour qualifier ou non telle personne morale d’autorité administrative au sens de l’article 14, § 1er, des lois sur le Conseil d’Etat, une distinction s’impose.
Il convient de distinguer :
- d’une part, les personnes morales créées par les pouvoirs publics, fût-ce sous une forme de droit privé, aux fins d’assurer une mission de service public ;
- d’autre part, les personnes morales de droit privé, nées de la seule initiative privée, mais agréées ou contrôlées par les pouvoirs publics pour assumer une mission de service public.
Le Conseil d’Etat estime que les premières sont parties intégrantes de l’administration, et qu’elles peuvent être qualifiées d’autorités administratives, même si elles ne sont pas fondées à prendre des décisions obligatoires vis-à-vis de tiers.
Les secondes ne seront qualifiées d’autorités administratives que si elles sont habilitées à prendre et lorsqu’elles prennent unilatéralement des décisions obligatoires à l’égard des tiers.
Notre avis :
Si cette décision s’inscrit dans le prolongement d’autres arrêts récents rendus par la Haute juridiction administrative (C.E., 9 février 2000, n° 85.245, Damoiseau ; C.E., n° 101.224 du 28 novembre 2001, S.A. Colligon Eng ; C.E., 6 novembre 2007, n° 176.478, S.A. Algemene Aannemingen Van Laere,; C.E., 22 janvier 2008, n° 178.821, Michotte C.E., n° 200.245 du 29 janvier 2010, S.A. Delta Thermic ; C.E., n° 209.794, 16 décembre 2010, S.A Bernard Construction), il faut constater qu’elle semble s’écarter, en ce qui concerne les personnes morales créées par les pouvoirs publics, de la jurisprudence de la Cour de cassation qui ne semblait pas établir de distinction à ce propos.
Notre conseil :
La préférence pourrait être donnée à la jurisprudence du Conseil d’Etat, laquelle apparaît raisonnable et, somme toute, assez logique.
La situation actuelle reste toutefois inconfortable pour les pouvoirs adjudicateurs, puisque que c’est, en définitive, à la Cour de cassation qu’il appartient de statuer sur les conflits d’attribution, et donc sur la notion d’autorité administrative.