Longtemps, le secret professionnel a été considéré comme absolu. Hors le cas où il était appelé à témoigner en justice, rien n’autorisait l’avocat à révéler les informations confidentielles qu’il avait reçues dans l’exercice de sa profession, d’ailleurs que ce soit directement de son client ou à l’occasion de la défense de son client. Et même en justice, personne ne pouvait forcer l’avocat à parler : lui seul appréciait, en son âme et conscience, s’il était opportun de répondre aux questions qui lui étaient posées. L’avocat est tenu au secret, sauf en justice. Il a droit au secret, même en justice.
En 1987, à propos d’une affaire célèbre (des détenus en cavale avaient appelé un médecin au chevet d’un des leurs, blessé dans la fusillade qu’ils avaient déclenchée lors de leur évasion, et le médecin avait révélé leur cachette à la police), la Cour de cassation admettra que “le secret professionnel n’est pas absolu. Il peut céder devant des valeurs supérieures, telle la préservation de la vie d’autrui”.
Quelques années plus tard, la Cour constitutionnelle élargira l’exception : « la règle du secret professionnel doit céder, lorsqu’une nécessité l’impose ou lorsqu’une valeur jugée supérieure entre en conflit avec elle ».
Mais les cas dans lesquels il sera admis que le secret doit s’effacer devant pareille valeur supérieure sont rares. C’est ainsi que la Cour constitutionnelle, puis la Cour européenne des droits de l’homme n’admettront que l’avocat soit délié du secret pour respecter les obligations de dénonciation imposées par les dispositions qui visent à réprimer le blanchiment de capitaux en vue de financer les activités de grand banditisme ou de terrorisme que pour autant, d’une part, que l’on se trouve en dehors de la mission traditionnelle de défense et de conseil de l’avocat et, d’autre part, que ces dénonciations soient filtrées par le bâtonnier, chargé de vérifier que l’on se trouve bien en dehors de ces missions traditionnelles et que le soupçon qui nourrit la dénonciation est avéré.
Depuis le 20 novembre 2000, l’article 458bis du code pénal comprend une importante restriction au secret professionnel. Faisant une application particulière de l’état de nécessité consacré par la cour de cassation en 1987, il autorise les professionnels qui ont examiné un mineur ou qui ont recueilli ses confidences à les révéler en cas de danger grave et imminent pour l’intégrité physique ou mentale d’un mineur s’ils ne sont pas en mesure, seuls ou avec l’aide de tiers, de protéger cette intégrité.
Par deux lois successives des 28 novembre 2011 et 23 février 2012, le champ d’application de cette disposition a été élargi à des nombreuses personnes vulnérables. L’exigence d’un entretien personnel ou d’un examen de la victime a été supprimée. Et le danger à prévenir a été élargi aux hypothèses de danger visant d’autres personnes (celles qui sont vulnérables en raison de leur âge, d'un état de grossesse, de la violence entre partenaires, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale).
Par son arrêt du 26 septembre 2013, la Cour constitutionnelle a annulé ces nouvelles dispositions, mais uniquement en ce qu’elles concernaient les avocats. « Les avocats prennent une part importante dans l’administration de la justice, ce qui justifie que les conditions d’accès et d’exercice à cette profession obéissent à des règles propres, différentes de celles qui régissent d’autres professions libérales … », a-t-elle énoncé.
« L’effectivité des droits de la défense de tout justiciable suppose nécessairement qu’une relation de confiance puisse être établie entre lui et l’avocat qui le conseille et le défend. Cette nécessaire relation de confiance ne peut être établie et maintenue que si le justiciable a la garantie que ce qu’il confiera à son avocat ne sera pas divulgué par celui-ci. Il en découle que la règle du secret professionnel imposée à l’avocat est un élément fondamental des droits de la défense ».
La Cour a donc estimé que la confidentialité des rapports entre un avocat et son client était à ce point essentielle à l’administration de la justice qu’elle ne pouvait céder que dans des hypothèses vraiment exceptionnelles.
Le secret professionnel en sort donc renforcé, même si d’autres lignes de front sont déjà ouvertes (AVOCATS.BE vient d’introduire un recours en annulation contre certaines dispositions du Code de droit économique, qui autorisent l’auditorat de la concurrence à faire un usage temporaire de documents saisis au mépris du secret professionnel. L’assujettissement des avocats à la T.V.A. pose également plusieurs questions en matière de respect du secret professionnel. Nous y reviendrons).
En 1987, à propos d’une affaire célèbre (des détenus en cavale avaient appelé un médecin au chevet d’un des leurs, blessé dans la fusillade qu’ils avaient déclenchée lors de leur évasion, et le médecin avait révélé leur cachette à la police), la Cour de cassation admettra que “le secret professionnel n’est pas absolu. Il peut céder devant des valeurs supérieures, telle la préservation de la vie d’autrui”.
Quelques années plus tard, la Cour constitutionnelle élargira l’exception : « la règle du secret professionnel doit céder, lorsqu’une nécessité l’impose ou lorsqu’une valeur jugée supérieure entre en conflit avec elle ».
Mais les cas dans lesquels il sera admis que le secret doit s’effacer devant pareille valeur supérieure sont rares. C’est ainsi que la Cour constitutionnelle, puis la Cour européenne des droits de l’homme n’admettront que l’avocat soit délié du secret pour respecter les obligations de dénonciation imposées par les dispositions qui visent à réprimer le blanchiment de capitaux en vue de financer les activités de grand banditisme ou de terrorisme que pour autant, d’une part, que l’on se trouve en dehors de la mission traditionnelle de défense et de conseil de l’avocat et, d’autre part, que ces dénonciations soient filtrées par le bâtonnier, chargé de vérifier que l’on se trouve bien en dehors de ces missions traditionnelles et que le soupçon qui nourrit la dénonciation est avéré.
Depuis le 20 novembre 2000, l’article 458bis du code pénal comprend une importante restriction au secret professionnel. Faisant une application particulière de l’état de nécessité consacré par la cour de cassation en 1987, il autorise les professionnels qui ont examiné un mineur ou qui ont recueilli ses confidences à les révéler en cas de danger grave et imminent pour l’intégrité physique ou mentale d’un mineur s’ils ne sont pas en mesure, seuls ou avec l’aide de tiers, de protéger cette intégrité.
Par deux lois successives des 28 novembre 2011 et 23 février 2012, le champ d’application de cette disposition a été élargi à des nombreuses personnes vulnérables. L’exigence d’un entretien personnel ou d’un examen de la victime a été supprimée. Et le danger à prévenir a été élargi aux hypothèses de danger visant d’autres personnes (celles qui sont vulnérables en raison de leur âge, d'un état de grossesse, de la violence entre partenaires, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale).
Par son arrêt du 26 septembre 2013, la Cour constitutionnelle a annulé ces nouvelles dispositions, mais uniquement en ce qu’elles concernaient les avocats. « Les avocats prennent une part importante dans l’administration de la justice, ce qui justifie que les conditions d’accès et d’exercice à cette profession obéissent à des règles propres, différentes de celles qui régissent d’autres professions libérales … », a-t-elle énoncé.
« L’effectivité des droits de la défense de tout justiciable suppose nécessairement qu’une relation de confiance puisse être établie entre lui et l’avocat qui le conseille et le défend. Cette nécessaire relation de confiance ne peut être établie et maintenue que si le justiciable a la garantie que ce qu’il confiera à son avocat ne sera pas divulgué par celui-ci. Il en découle que la règle du secret professionnel imposée à l’avocat est un élément fondamental des droits de la défense ».
La Cour a donc estimé que la confidentialité des rapports entre un avocat et son client était à ce point essentielle à l’administration de la justice qu’elle ne pouvait céder que dans des hypothèses vraiment exceptionnelles.
Le secret professionnel en sort donc renforcé, même si d’autres lignes de front sont déjà ouvertes (AVOCATS.BE vient d’introduire un recours en annulation contre certaines dispositions du Code de droit économique, qui autorisent l’auditorat de la concurrence à faire un usage temporaire de documents saisis au mépris du secret professionnel. L’assujettissement des avocats à la T.V.A. pose également plusieurs questions en matière de respect du secret professionnel. Nous y reviendrons).
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